[ENQUÊTE] Quoi de neuf dans le Retail de Luxe ? (Partie 4/4)

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Comme vu dans la première partie, les grands magasins et boutiques de luxe rivalisent d’ingéniosité pour capter une attention en berne et susciter le désir de leur clientèle. Plus qu’une scénographie design, il s’agit de mieux connaître et mieux servir le client. Dans ce domaine, ils peuvent faire la différence avec des plateformes ecommerce incapables de prodiguer une large palette d’émotions nées d’une expérience client unique, mémorable et foncièrement humaine.

 

Plongée au cœur du Retail, modèle historique de la distribution du luxe à l’aune de l’après COVID et des univers virtuels étendus du web 3.

 

Virtual Commerce et expérience client sans frontière

 

Avec des canaux allant bien au-delà de la boutique physique, du site e-commerce et des réseaux sociaux, les marques de luxe doivent assurer le suivi et la cohérence de l’expérience où que le client se trouve. Or, d’après le dernier livre blanc “Processer les Emotions” du cabinet MAD, 66% des clients qui percevraient une forme de défaillance dans l’expérience de marque omnicanale seraient bien plus enclins à se détourner de la marque.

 

Alors que la technologie se fait plus rare en boutique dans le luxe, elle devient, en revanche, bien plus visible hors les murs. Expositions temporaires, évènements et salons professionnels deviennent autant de prétextes pour transporter le client vers des univers 3D immersifs. De nouveaux espaces expérientiels, propulsés par la déferlante de cet internet décentralisé que l’on nomme Web3. Une démarche qui contribue autant à une prolongation personnalisée et communautaire de l’expérience en boutique, qu’à une démocratisation via la blockchain de l’usage des crypto-monnaies et des objets digitaux rares que l’on nomme NFT (Non Fungible Token).

Web 3 et boutiques virtuelles

 

Avec le Web 3, l’expérience magasin à distance prend une nouvelle dimension communautaire et immersive.Après avoir connu la phase de consultation de la donnée aux débuts d’internet (web1), celle de la consultation et de la création de la donnée via la blogosphère et les réseaux sociaux, place à l’étape suivante. Synthèse des deux périodes précédentes, le Web 3 y ajoute la propriété. En d’autres termes, les internautes peuvent enfin reprendre le contrôle sur leurs créations et les monétiser.

 

L’expression la plus connue de ce nouveau “Far Web” a longtemps été le “métavers”. Or, depuis la préemption du mot Méta l’année dernière par Mark Zuckerberg pour renommer la société mère de ses entreprises Facebook et Instagram, on parle désormais plus volontiers d’“univers virtuels décentralisés”. Des univers virtuels qui ont beau être apparus aux alentours des années 2000 (1997 en France avec le Deuxième Monde par Canal + puis 2007 avec Second Life), jamais ils ne connurent autant d’engouement que lors de ces deux dernières années.

 

Ainsi, le concept du Deuxième monde qui permettait de déambuler dans les rues d’un Paris pixellisé est remis au goût du jour en 2023 avec le projet Love In Paris par Metaverse Studio x Sandbox. Une expérience permettant de visiter des lieux emblématiques et de rencontrer des personnages iconiques, tels que Edith Piaf, Jules Vernes ou encore Victor Hugo.

 

 

© Metaverse Studio x Sandbox – Love In Paris

 

Stéphane Gallieni, fondateur de l’agence créative de luxe Balistik Art est également un pionnier du web 3, domaine auquel il vient de consacrer un ouvrage didactique. Son agence est ainsi à l’origine des premières activations de marques sur ce qui était le tout premier métavers international : Second Life. En 2007, il y a ainsi accompagné des Maisons aussi prestigieuses que Jean-Paul Gaultier, Lancôme (à l’époque propriété de la famille Courtin Clarins) ou encore Thierry Mugler.

 

Un proto-métavers dont le succès fut aussi fulgurant que furtif, puisqu’un an plus tard, ce monde virtuel tomba en désuétude. Ce n’est qu’en 2021, que le métavers refait parler de lui de plus belle au point de générer plus de 150 univers virtuels différents à l’échelle mondiale, comme Roblox ou Decentraland.

 

© Thierry Mugler – L’île du Docteur Muglerstein sur Second Life, par Balistik Art, 2007

Boutique virtuelle

 

Pour Stéphane Gallieni, malgré l’extrême diversité de métavers, le modèle a ses invariants : “il s’agit d’univers virtuels, immersifs, imbriqués et surtout persistants (actualisés en temps réel même lorsque l’utilisateur n’est pas connecté). Une expérience vécue dans la peau de son avatar à mi-chemin entre l’interaction des réseaux sociaux et l’univers ludique du jeu vidéo.”

 

Chez des distributeurs désireux de s’implanter dans ces nouveaux univers, la boutique virtuelle apparaît comme le cas d’usage le plus répandu. Ce modèle a l’avantage de résoudre un vrai point de friction dans l’expérience luxe digitale : la mise à distance du produit de luxe par la 2D. A contrario, la 3D permet au client d’observer le produit de luxe sous tous les angles. Avec les progrès technologiques enregistrés dans la réalité augmentée et l’ultra haute définition 4K, le client peut même essayer un produit confondant de réalisme en vue subjective, comme si c’était lui qui portait la bague ou la montre en question. Un jumeau numérique que son avatar peut librement arborer en tant que tel ou juste essayer en vue d’un achat physique. Il peut ensuite payer avec sa carte bleue ou d’autres solutions de paiement. Il en ressort “une expérience mémorable à mi-chemin entre ce que le client aurait vécu en magasin et le facility commerce (ouvert 24/24 7/7)”.

 

Ce retail 3.0 ou V commerce (Virtual Commerce) est constitué d’espaces phygitaux mixant expérience en boutique et sur le digital. Stéphane Galienni (Balistik Art) relève deux points d’extension répondant à ce V commerce émergent dans l’expérience luxe. D’une part, des dispositifs en réalité augmentée sur application mobile ou en magasin où le client a la possibilité de recevoir des points de récompense en fonction de son engagement et de ses actions. D’autre part, le V commerce peut prendre la forme d’un duplicata virtuel du magasin physique – y compris sous une forme fantaisiste – avec une fonction e-commerce en virtual shopping, comme chez Lacoste avec son projet UNDW3.

 

Pionnières

 

“Des entreprises ont pris les devants. Tout n’était certes pas parfait mais il y a eu cet effet de communication autour d’initiatives intéressantes, de quoi voir se profiler les fondamentaux du point de vente de demain” note Stéphane Gallieni (Balistik Art).

 

© EEVARIA Berlin boutique virtuelle par Rave.Space

 

Présente sur le salon Vivatech 2022, la Maison Dior avait ainsi dévoilé en avant-première son expérience en réalité augmentée permettant à l’internaute – comme au mobinaute – d’arpenter la boutique Dior 30 Montaigne dans sa version virtuelle. Depuis, d’autres initiatives ont vu le jour. La marque de maroquinerie allemande EEVARIA. Ria a ainsi conçu avec l’agence Rave.Space sa boutique virtuelle, présentant ses produits en 3D tandis que l’antiquaire parisien Gismondo & Darmo, accompagné de la startup Societhy, a proposé une galerie virtuelle où mobiliers, peintures et sculptures étaient vendus sous forme de NFT ultra haute définition donnant aussi accès à l’oeuvre physique.

 

© Gismondo & Darmo Galerie virtuelle par Societhy

 

Le fondateur de l’agence Balistik Art met toutefois en garde les professionnels face à la plupart des initiatives web3 récentes encore trop exécutées sous un angle web2, notamment via le renvoi à de simples fiches produits e-commerce 2D : “Souvent il y a une méconnaissance des audiences, des outils comme du champ des possibles. Par ailleurs, trop de personnes restent persuadées que ces univers virtuels ne sont accessibles que via un casque Oculus hors de prix. Or, il est tout à fait possible d’accéder à de telles expériences immersives par un simple smartphone ou un ordinateur portable.”

Gucci : bon élève du retail 3.0

 

A contrario, Gucci fait partie des bons élèves de ce retail 3.0. La marque italienne a pris le temps d’expérimenter de nombreux métavers comme Zepeto, Sandbox ou encore Roblox, ce qui lui a permis de se positionner sur un univers virtuel en phase avec ses valeurs et la cible visée. Ainsi, Zepeto, plateforme social media sud coréenne, utilisée par 62% des femmes de 15 à 25 ans, s’avère particulièrement pertinente pour les marques de luxe souhaitant parler aux futures clientes du luxe. Soit des primo-accédantes qui s’offrent leur premier parfum ou leur premier sac à main, dans une logique statutaire. L’équipementier sportif Nike avec son Nikeland sur Roblox a lui aussi parfaitement assimilé les attentes et les codes culturels liés au web3. Stéphane Galienni (Balistik Art) précise ainsi, que contrairement à une idée reçue, l’expérience web 3 est surtout portée par les membres de la génération Alpha et non la génération Z.

 

© Gucci par Zepeto

 

Côté grands magasins, le Printemps, qui cherchait à refondre son image, a développé, l’année dernière “Mon Premier Virtual Store”, son propre micro-univers virtuel avec la startup Meta.VRS, présente au salon NRF. Une expérience immersive où il était possible d’acquérir cinq vêtements imaginés pour la nouvelle identité du grand magasin ainsi que des NFT conçus par l’artiste Romain Froquet. Le client pouvait également procéder à des essayages virtuels et même recevoir sa photo dans la tenue de son choix, via l’application Dress X.

 

Cette opportunité de rajeunir sa cible lui a permis d’être sur la première place du podium. Ancien collaborateur de ce temple du shopping de luxe parisien, Nicolas Rebet (RETAILSCOPE) abonde. “Il y a 10 ans le Printemps ne disposait même pas d’un site e-commerce et aujourd’hui il est prix de la FEVAD 2022.”

 

© Printemps

 

D’autres établissements s’en sortent honorablement comme Bloomingdale’s. Le grand magasin américain a ainsi “événementialisé” ses initiatives Web 3, donnant autant de prétexte pour les internautes à revenir. Pour Noël, il a ainsi développé des espaces thématiques, dédiés aux marques de luxe comme Chanel ou encore Ralph Lauren, avec l’aide de Emperia, leader de la réalité virtuelle appliquée au retail, à la mode et à l’art.

 

© Bloomingdale’s – Espace Party Room 150 ans, par Emperia

Evénements culturels phygitaux

 

L’expérience client de luxe peut également être augmentée par des évènements culturels phygitaux en parallèle de la visite en boutique. Ainsi, les expériences digitales immersives se retrouvent désormais dans des expositions temporaires, dont l’organisation est internalisée par la marque. Sabine Temin (LUXURYTAIL) évoque ainsi les animations déployées en décembre dernier comme le Grand Numéro de Chanel au Grand Palais éphémère ou encore Dior Beauté. Cette dernière opération proposait une expérience en réalité augmentée pour voir les constellations, dans le cadre de son Atelier des rêves, au plein cœur du parc Monceau.

 

© LV Dream

 

Actuellement, c’est l’exposition LV Dream par la Maison Louis Vuitton, implantée dans l’ancien grand magasin La Belle Jardinière – face à la Samaritaine – qui montre un sens de l’expérientiel exemplaire hors-les-murs. Outre un café, une chocolaterie et un espace souvenirs, LV Dream propose pas moins de neuf salles interactives. Le visiteur a ainsi accès à un large panorama d’œuvres originales, issues du dialogue permanent entre les artistes et les produits malletiers du numéro un du luxe. Pour Sabine Temin (LUXURYTAIL), le portrait digital (installation IA) du fondateur Louis Vuitton, par l’artiste chinois Cao Fei, constitue le point d’orgue de cette expérience, à mi-chemin entre exposition phygitale et point de contact commercial.

 

“Maintenant si vous voulez voir une exposition Dior, vous irez au 30 Montaigne et plus nécessairement au Musée des Arts décoratifs ou au Palais Galliera.” explique Sabine Temin (LUXURYTAIL).

Crypto-monnaies et NFT

 

Autre mythe à démentir, se positionner dans le web3 n’implique pas nécessairement pour les retailers du luxe d’ouvrir leur boutique virtuelle.  Des ponts existent dans le monde réel en particulier pour ce qui est des moyens de paiement et des récompenses proposées aux clients. Dans ces conditions, le point d’entrée d’un retailer dans le web 3 peut commencer par la question d’une ouverture à la cryptomonnaie ?

 

Face aux sceptiques, Stéphane Gallieni a la réponse toute trouvée : “Pour ceux qui diraient qu’ils ont d’autres d’investissement prioritaires ou que le ROI laisserait à désirer, je veux leur dire ceci : pour récupérer des cryptos ou des NFT, il faut un crypto wallet (portefeuille numérique permettant de stocker des crypto actifs). Or, on dénombre 84 millions de possesseurs de wallets en 2022, dont 30 millions sur Metamask. Ainsi, le jumeau numérique sous forme de NFT d’une pièce de luxe aura beau être vendu à une fraction infime du prix de vente du produit physique en magasin, il pourra potentiellement séduire des millions d’internautes intéressés par ces nouveaux usages ».

 

Preuve à l’appui, 25% des biens détenus par les américains issus des générations Millennials et Z sont sous forme de crypto actifs. Au-delà de l’acquisition d’une œuvre numérique esthétique à l’image des valeurs de la Maison, le client ne donne pas ici ses données comme il le donnerait aux GAFAM ou à l’entreprise via un email. Au contraire, il conserve la propriété de ses données personnelles et peut même acheter ce qu’il veut dans la boutique.

 

Même si c’est passé quasiment inaperçu, Philipp Plein, designer allemand à l’univers bling et rock, a ouvert son compte e-commerce en août 2022. Très avant-gardiste, il a tout de suite ouvert les moyens de paiement à une quinzaine de crypto-monnaies différentes. En boutique Phlipp Plein aussi, il est désormais possible de régler ses achats en crypto-monnaies. Dans le même esprit, Courbet, la  Maison de haute joaillerie de la place Vendôme, aux valeurs ancrées dans l’engagement durable, s’est associée à la start-up LUNU qui propose un terminal de paiement crypto installé en points de vente.

 

© Philipp Plein – capture d’écran application crypto

Gentrification du metaverse

 

Pour Stéphane Gallieni (Balistik Art), l’initiative la plus marquante à date dans le luxe reste Gucci Town qu’il qualifie de “gentrification du metavers”. Cette opération figure d’ailleurs parmi les 25 cas d’usage majeurs présentés dans La Vague Web 3,  son dernier ouvrage coécrit avec Stéphane Truphème. “L’implantation permanente de la marque sur Roblox permet d’expliquer Gucci aux plus jeunes. La marque bénéficie ainsi d’un espace de sociabilisation, d’exposition et d’une boutique où le moindre sweatshirt ou la moindre paire de sneakers a beau coûter 12-30 dollars, elle est rendue disponible sur des espaces marchands virtuels pouvant potentiellement attirer des millions de joueurs.”

 

Nike l’a également bien compris avec son Nikeland. “Une nouvelle cible autour de 15 ans va venir pour des activités ludiques et pouvoir customiser son avatar pour quelques dollars. Voilà qui crée quasiment une diversification sectorielle sur le gaming et sur l’objet virtuel.”

 

© Nike Nikeland sur Roblox

 

Deux entreprises du luxe qui ont saisi un business model balbutiant inspiré du Direct-To-Consumer, celui du D2A ou Direct To Avatar. “En créant mon produit de luxe virtuel sur des jeux comme Animal Crossings ou Fortnite, je le duplique à l’infini, ce qui crée autant de revenus. Si on ajoute à cela la monnaie virtuelle du jeu, ça peut se traduire par une transaction payante pour l’entreprise”.

 

Pour conclure, l’expérience client de luxe en 2023 ressemble à une pyramide de Maslow selon Delphine de Vitry (Cabinet MAD), “c’est assez compliqué de profiter pleinement d’une expérience avec un conseiller de vente, de ressentir pleinement la relation à un produit, si vous êtes dans un environnement dans lequel vous ne vous sentez pas bien.” Il est clair que si le point de vente reste la priorité de 95% des clients du luxe pour être conseillé (Boston Consulting Group), il devra veiller à l’excellence de son exécution et servir les attentes des nouvelles générations.

 

Lire aussi > [Investigation] What’s new in Luxury Retail? (Part 3/4)

 

Photo à la Une : © Fortnite [/vc_column_text][/vc_column][/vc_row][vc_row njt-role= »not-logged-in »][vc_column][vc_column_text]

Comme vu dans la première partie, les grands magasins et boutiques de luxe rivalisent d’ingéniosité pour capter une attention en berne et susciter le désir de leur clientèle. Plus qu’une scénographie design, il s’agit de mieux connaître et mieux servir le client. Dans ce domaine, ils peuvent faire la différence avec des plateformes ecommerce incapables de prodiguer une large palette d’émotions nées d’une expérience client unique, mémorable et foncièrement humaine.

 

Plongée au cœur du Retail, modèle historique de la distribution du luxe à l’aune de l’après COVID et des univers virtuels étendus du web 3.

 

Virtual Commerce et expérience client sans frontière

 

Avec des canaux allant bien au-delà de la boutique physique, du site e-commerce et des réseaux sociaux, les marques de luxe doivent assurer le suivi et la cohérence de l’expérience où que le client se trouve. Or, d’après le dernier livre blanc “Processer les Emotions” du cabinet MAD, 66% des clients qui percevraient une forme de défaillance dans l’expérience de marque omnicanale seraient bien plus enclins à se détourner de la marque.

 

Alors que la technologie se fait plus rare en boutique dans le luxe, elle devient, en revanche, bien plus visible hors les murs. Expositions temporaires, évènements et salons professionnels deviennent autant de prétextes pour transporter le client vers des univers 3D immersifs. De nouveaux espaces expérientiels, propulsés par la déferlante de cet internet décentralisé que l’on nomme Web3. Une démarche qui contribue autant à une prolongation personnalisée et communautaire de l’expérience en boutique, qu’à une démocratisation via la blockchain de l’usage des crypto-monnaies et des objets digitaux rares que l’on nomme NFT (Non Fungible Token).

Web 3 et boutiques virtuelles

 

Avec le Web 3, l’expérience magasin à distance prend une nouvelle dimension communautaire et immersive.Après avoir connu la phase de consultation de la donnée aux débuts d’internet (web1), celle de la consultation et de la création de la donnée via la blogosphère et les réseaux sociaux, place à l’étape suivante. Synthèse des deux périodes précédentes, le Web 3 y ajoute la propriété. En d’autres termes, les internautes peuvent enfin reprendre le contrôle sur leurs créations et les monétiser.

 

L’expression la plus connue de ce nouveau “Far Web” a longtemps été le “métavers”. Or, depuis la préemption du mot Méta l’année dernière par Mark Zuckerberg pour renommer la société mère de ses entreprises Facebook et Instagram, on parle désormais plus volontiers d’“univers virtuels décentralisés”. Des univers virtuels qui ont beau être apparus aux alentours des années 2000 (1997 en France avec le Deuxième Monde par Canal + puis 2007 avec Second Life), jamais ils ne connurent autant d’engouement que lors de ces deux dernières années.

 

Ainsi, le concept du Deuxième monde qui permettait de déambuler dans les rues d’un Paris pixellisé est remis au goût du jour en 2023 avec le projet Love In Paris par Metaverse Studio x Sandbox. Une expérience permettant de visiter des lieux emblématiques et de rencontrer des personnages iconiques, tels que Edith Piaf, Jules Vernes ou encore Victor Hugo.

 

 

© Metaverse Studio x Sandbox – Love In Paris

 

Stéphane Gallieni, fondateur de l’agence créative de luxe Balistik Art est également un pionnier du web 3, domaine auquel il vient de consacrer un ouvrage didactique. Son agence est ainsi à l’origine des premières activations de marques sur ce qui était le tout premier métavers international : Second Life. En 2007, il y a ainsi accompagné des Maisons aussi prestigieuses que Jean-Paul Gaultier, Lancôme (à l’époque propriété de la famille Courtin Clarins) ou encore Thierry Mugler.

 

Un proto-métavers dont le succès fut aussi fulgurant que furtif, puisqu’un an plus tard, ce monde virtuel tomba en désuétude. Ce n’est qu’en 2021, que le métavers refait parler de lui de plus belle au point de générer plus de 150 univers virtuels différents à l’échelle mondiale, comme Roblox ou Decentraland.

 

© Thierry Mugler – L’île du Docteur Muglerstein sur Second Life, par Balistik Art, 2007

Boutique virtuelle

 

Pour Stéphane Gallieni, malgré l’extrême diversité de métavers, le modèle a ses invariants : “il s’agit d’univers virtuels, immersifs, imbriqués et surtout persistants (actualisés en temps réel même lorsque l’utilisateur n’est pas connecté). Une expérience vécue dans la peau de son avatar à mi-chemin entre l’interaction des réseaux sociaux et l’univers ludique du jeu vidéo.”

 

Chez des distributeurs désireux de s’implanter dans ces nouveaux univers, la boutique virtuelle apparaît comme le cas d’usage le plus répandu. Ce modèle a l’avantage de résoudre un vrai point de friction dans l’expérience luxe digitale : la mise à distance du produit de luxe par la 2D. A contrario, la 3D permet au client d’observer le produit de luxe sous tous les angles. Avec les progrès technologiques enregistrés dans la réalité augmentée et l’ultra haute définition 4K, le client peut même essayer un produit confondant de réalisme en vue subjective, comme si c’était lui qui portait la bague ou la montre en question. Un jumeau numérique que son avatar peut librement arborer en tant que tel ou juste essayer en vue d’un achat physique. Il peut ensuite payer avec sa carte bleue ou d’autres solutions de paiement. Il en ressortune expérience mémorable à mi-chemin entre ce que le client aurait vécu en magasin et le facility commerce (ouvert 24/24 7/7)”.

 

Ce retail 3.0 ou V commerce (Virtual Commerce) est constitué d’espaces phygitaux mixant expérience en boutique et sur le digital. Stéphane Galienni (Balistik Art) relève deux points d’extension répondant à ce V commerce émergent dans l’expérience luxe. D’une part, des dispositifs en réalité augmentée sur application mobile ou en magasin où le client a la possibilité de recevoir des points de récompense en fonction de son engagement et de ses actions. D’autre part, le V commerce peut prendre la forme d’un duplicata virtuel du magasin physique – y compris sous une forme fantaisiste – avec une fonction e-commerce en virtual shopping, comme chez Lacoste avec son projet UNDW3.

 

Pionnières

 

“Des entreprises ont pris les devants. Tout n’était certes pas parfait mais il y a eu cet effet de communication autour d’initiatives intéressantes, de quoi voir se profiler les fondamentaux du point de vente de demain” note Stéphane Gallieni (Balistik Art).

 

© EEVARIA Berlin boutique virtuelle par Rave.Space

 

Présente sur le salon Vivatech 2022, la Maison Dior avait ainsi dévoilé en avant-première son expérience en réalité augmentée permettant à l’internaute – comme au mobinaute – d’arpenter la boutique Dior 30 Montaigne dans sa version virtuelle. Depuis, d’autres initiatives ont vu le jour. La marque de maroquinerie allemande EEVARIA. Ria a ainsi conçu avec l’agence Rave.Space sa boutique virtuelle, présentant ses produits en 3D tandis que l’antiquaire parisien Gismondo & Darmo, accompagné de la startup Societhy, a proposé une galerie virtuelle où mobiliers, peintures et sculptures étaient vendus sous forme de NFT ultra haute définition donnant aussi accès à l’oeuvre physique.

 

© Gismondo & Darmo Galerie virtuelle par Societhy

 

Le fondateur de l’agence Balistik Art met toutefois en garde les professionnels face à la plupart des initiatives web3 récentes encore trop exécutées sous un angle web2, notamment via le renvoi à de simples fiches produits e-commerce 2D : “Souvent il y a une méconnaissance des audiences, des outils comme du champ des possibles. Par ailleurs, trop de personnes restent persuadées que ces univers virtuels ne sont accessibles que via un casque Oculus hors de prix. Or, il est tout à fait possible d’accéder à de telles expériences immersives par un simple smartphone ou un ordinateur portable.”

Gucci : bon élève du retail 3.0

 

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Comme vu dans la première partie, les grands magasins et boutiques de luxe rivalisent d’ingéniosité pour capter une attention en berne et susciter le désir de leur clientèle. Plus qu’une scénographie design, il s’agit de mieux connaître et mieux servir le client. Dans ce domaine, ils peuvent faire la différence avec des plateformes ecommerce incapables de prodiguer une large palette d’émotions nées d’une expérience client unique, mémorable et foncièrement humaine.

 

Plongée au cœur du Retail, modèle historique de la distribution du luxe à l’aune de l’après COVID et des univers virtuels étendus du web 3.

 

Virtual Commerce et expérience client sans frontière

 

Avec des canaux allant bien au-delà de la boutique physique, du site e-commerce et des réseaux sociaux, les marques de luxe doivent assurer le suivi et la cohérence de l’expérience où que le client se trouve. Or, d’après le dernier livre blanc “Processer les Emotions” du cabinet MAD, 66% des clients qui percevraient une forme de défaillance dans l’expérience de marque omnicanale seraient bien plus enclins à se détourner de la marque.

 

Alors que la technologie se fait plus rare en boutique dans le luxe, elle devient, en revanche, bien plus visible hors les murs. Expositions temporaires, évènements et salons professionnels deviennent autant de prétextes pour transporter le client vers des univers 3D immersifs. De nouveaux espaces expérientiels, propulsés par la déferlante de cet internet décentralisé que l’on nomme Web3. Une démarche qui contribue autant à une prolongation personnalisée et communautaire de l’expérience en boutique, qu’à une démocratisation via la blockchain de l’usage des crypto-monnaies et des objets digitaux rares que l’on nomme NFT (Non Fungible Token).

Web 3 et boutiques virtuelles

 

Avec le Web 3, l’expérience magasin à distance prend une nouvelle dimension communautaire et immersive.Après avoir connu la phase de consultation de la donnée aux débuts d’internet (web1), celle de la consultation et de la création de la donnée via la blogosphère et les réseaux sociaux, place à l’étape suivante. Synthèse des deux périodes précédentes, le Web 3 y ajoute la propriété. En d’autres termes, les internautes peuvent enfin reprendre le contrôle sur leurs créations et les monétiser.

 

L’expression la plus connue de ce nouveau “Far Web” a longtemps été le “métavers”. Or, depuis la préemption du mot Méta l’année dernière par Mark Zuckerberg pour renommer la société mère de ses entreprises Facebook et Instagram, on parle désormais plus volontiers d’“univers virtuels décentralisés”. Des univers virtuels qui ont beau être apparus aux alentours des années 2000 (1997 en France avec le Deuxième Monde par Canal + puis 2007 avec Second Life), jamais ils ne connurent autant d’engouement que lors de ces deux dernières années.

 

Ainsi, le concept du Deuxième monde qui permettait de déambuler dans les rues d’un Paris pixellisé est remis au goût du jour en 2023 avec le projet Love In Paris par Metaverse Studio x Sandbox. Une expérience permettant de visiter des lieux emblématiques et de rencontrer des personnages iconiques, tels que Edith Piaf, Jules Vernes ou encore Victor Hugo.

 

 

© Metaverse Studio x Sandbox – Love In Paris

 

Stéphane Gallieni, fondateur de l’agence créative de luxe Balistik Art est également un pionnier du web 3, domaine auquel il vient de consacrer un ouvrage didactique. Son agence est ainsi à l’origine des premières activations de marques sur ce qui était le tout premier métavers international : Second Life. En 2007, il y a ainsi accompagné des Maisons aussi prestigieuses que Jean-Paul Gaultier, Lancôme (à l’époque propriété de la famille Courtin Clarins) ou encore Thierry Mugler.

 

Un proto-métavers dont le succès fut aussi fulgurant que furtif, puisqu’un an plus tard, ce monde virtuel tomba en désuétude. Ce n’est qu’en 2021, que le métavers refait parler de lui de plus belle au point de générer plus de 150 univers virtuels différents à l’échelle mondiale, comme Roblox ou Decentraland.

 

© Thierry Mugler – L’île du Docteur Muglerstein sur Second Life, par Balistik Art, 2007

Boutique virtuelle

 

Pour Stéphane Gallieni, malgré l’extrême diversité de métavers, le modèle a ses invariants : “il s’agit d’univers virtuels, immersifs, imbriqués et surtout persistants (actualisés en temps réel même lorsque l’utilisateur n’est pas connecté). Une expérience vécue dans la peau de son avatar à mi-chemin entre l’interaction des réseaux sociaux et l’univers ludique du jeu vidéo.”

 

Chez des distributeurs désireux de s’implanter dans ces nouveaux univers, la boutique virtuelle apparaît comme le cas d’usage le plus répandu. Ce modèle a l’avantage de résoudre un vrai point de friction dans l’expérience luxe digitale : la mise à distance du produit de luxe par la 2D. A contrario, la 3D permet au client d’observer le produit de luxe sous tous les angles. Avec les progrès technologiques enregistrés dans la réalité augmentée et l’ultra haute définition 4K, le client peut même essayer un produit confondant de réalisme en vue subjective, comme si c’était lui qui portait la bague ou la montre en question. Un jumeau numérique que son avatar peut librement arborer en tant que tel ou juste essayer en vue d’un achat physique. Il peut ensuite payer avec sa carte bleue ou d’autres solutions de paiement. Il en ressortune expérience mémorable à mi-chemin entre ce que le client aurait vécu en magasin et le facility commerce (ouvert 24/24 7/7)”.

 

Ce retail 3.0 ou V commerce (Virtual Commerce) est constitué d’espaces phygitaux mixant expérience en boutique et sur le digital. Stéphane Galienni (Balistik Art) relève deux points d’extension répondant à ce V commerce émergent dans l’expérience luxe. D’une part, des dispositifs en réalité augmentée sur application mobile ou en magasin où le client a la possibilité de recevoir des points de récompense en fonction de son engagement et de ses actions. D’autre part, le V commerce peut prendre la forme d’un duplicata virtuel du magasin physique – y compris sous une forme fantaisiste – avec une fonction e-commerce en virtual shopping, comme chez Lacoste avec son projet UNDW3.

 

Pionnières

 

“Des entreprises ont pris les devants. Tout n’était certes pas parfait mais il y a eu cet effet de communication autour d’initiatives intéressantes, de quoi voir se profiler les fondamentaux du point de vente de demain” note Stéphane Gallieni (Balistik Art).

 

© EEVARIA Berlin boutique virtuelle par Rave.Space

 

Présente sur le salon Vivatech 2022, la Maison Dior avait ainsi dévoilé en avant-première son expérience en réalité augmentée permettant à l’internaute – comme au mobinaute – d’arpenter la boutique Dior 30 Montaigne dans sa version virtuelle. Depuis, d’autres initiatives ont vu le jour. La marque de maroquinerie allemande EEVARIA. Ria a ainsi conçu avec l’agence Rave.Space sa boutique virtuelle, présentant ses produits en 3D tandis que l’antiquaire parisien Gismondo & Darmo, accompagné de la startup Societhy, a proposé une galerie virtuelle où mobiliers, peintures et sculptures étaient vendus sous forme de NFT ultra haute définition donnant aussi accès à l’oeuvre physique.

 

© Gismondo & Darmo Galerie virtuelle par Societhy

 

Le fondateur de l’agence Balistik Art met toutefois en garde les professionnels face à la plupart des initiatives web3 récentes encore trop exécutées sous un angle web2, notamment via le renvoi à de simples fiches produits e-commerce 2D : “Souvent il y a une méconnaissance des audiences, des outils comme du champ des possibles. Par ailleurs, trop de personnes restent persuadées que ces univers virtuels ne sont accessibles que via un casque Oculus hors de prix. Or, il est tout à fait possible d’accéder à de telles expériences immersives par un simple smartphone ou un ordinateur portable.”

Gucci : bon élève du retail 3.0

 

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Victor Gosselin
Victor Gosselin est journaliste spécialisé luxe, RH, tech, retail et consultant éditorial. Diplômé de l’EIML Paris, il évolue depuis 9 ans dans le luxe. Féru de mode, d’Asie, d’histoire et de long format, cet ex-Welcome To The Jungle et Time To Disrupt aime analyser l’info sous l’angle sociologique et culturel.

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