[ENQUÊTE] Corée du Sud : pourquoi ce pays séduit autant le luxe en 2023 (Partie 4/5)

Repère des plus grands consommateurs de produits de luxe, la Corée du sud attise la convoitise des marques du secteur. D’autant plus que le pays a connu une croissance exponentielle en l’espace de 50 ans seulement. Si sa population est parvenue à sortir de l’extrême misère, c’est à force de travail acharné et d’une fierté retrouvée dans sa culture, le tout encouragé par le gouvernement.

 

Poursuivons notre exploration de l’économie du Pays du matin calme. Après avoir vu les défilés-évènements, les ouvertures de boutiques de luxe et le miracle économique, interressons-nous aux leviers qui ont permis au « petit pays » d’émerger sur la scène internationale.

 

Suite à la terrible crise économique qui secoue le sud-est asiatique en 1997, le gouvernement sud-coréen décide de changer de braquet, exit l’électronique, place aux produits culturels et en premier lieu les séries TV (K Drama) et la musique (K pop). 

 

L’objectif étant de faire venir massivement des capitaux étrangers. Pour ce faire, le gouvernement n’aura de cesse de revaloriser la marque Corée à travers le divertissement. 

 

Le syndrome Jurassic Park

 

L’outil avait déjà servi à merveille son voisin nippon dans les années 1980, reste plus qu’à adapter ce Cool Japan si Kawai (“mignon”, ndlr) pour bâtir un Cool Korea. D’autant que la consommation de produits culturels issus de l’ancien occupant est restée très longtemps bannie sur le territoire. 

 

La légende raconte que ce pivot historique aurait été insufflé par… Steven Spielberg, ou plutôt son blockbuster Jurassic Park, sorti en 1993, 4 ans avant le krach boursier asiatique. 

 

Dans leur ouvrage K-Pop Soft Power et Culture Globale, les sociologues et chercheurs Vincenzo Cicchelli et Sylvie Octobre l’appelle le « syndrome Jurassic Park », tant l’épisode fit office de révélation pour le gouvernement. 

 

En effet, le 17 mai 1994, le Conseil consultatif présidentiel sur la science et la technologie présente un avis intitulé le “Plan stratégique pour la croissance de l’industrie des arts visuels de haute technologie”. Au cours de cette réunion, les participants s’arrêtent sur les recettes du film dinosauresque et il y a de quoi : Le film au budget de 65 millions de dollars a rapporté 850 millions en une année, au point que “les revenus du film sont équivalents au montant représenté par l’exportation de 1,5 million de véhicules.”

 

Il n’en faut pas plus pour convaincre le gouvernement de la puissance du contenu culturel. La crise du change qui frappe le le Sud-Est Asiatique convainc le pays de diversifier son économie. Désormais, en plus de son industrie lourde (construction navale et automobile, sidérurgie et chimie lourde), le pays produira des biens esthétiques culturels

 

Pop up store du groupe musical sud-coréen BTS en 2020 avec ses figurines géantes et ses produits dérivés © presse

 

Toutefois, si cette réorientation a été possible, c’est parce que, comme le dit Vincenzo Cicchelli, “la modernisation s’était déjà produite, tout comme l’élévation du niveau de diplôme, tandis qu’un terreau de créateurs disponibles était déjà présent. On ne décide pas de devenir ex-nihilo une nation créative.”

 

Pascale Elmalan (A.X.I.A.N Partners), consultante et professeur de marketing à la faculté de pharmacie de Montpellier, cite l’exemple de la K-beauty où la Corée a pu bénéficier de son statut de sous-traitant des manufactures japonaises.

 

Bâtiment historique du centre de recherches et développement du chaebol Amore Pacific, devenu géant mondial de la beauté © Amore Pacific

 

“Le pays avec ses Chaebols – des conglomérats globaux puissants comme Samsung, LG ou Amore Pacific – était très bien équipé en infrastructures. On peut dire qu’ils ont adopté avant l’heure la culture de la startup – et son“fail fast”, selon lequel l’échec précoce est indispensable à toute réussite.”  

 

Ensuite, pour Joëlle Montgolfier (Bain), l’extrême misère et les tensions politiques auxquelles a été exposée sa population ont permis l’émergence “d’individus extrêmement travailleurs et ce dès un âge peu avancé.”

 

Selon Pascale Elmalan (A.X.I.A.N Partners), “En Corée, réside l’idée que l’on est plus fort ensemble. La prestigieuse dynastie des Joseon a modelé le pays et sa culture avant de subir l’invasion du Japon et sa partition. A l’instar de la règle des 996 qui rythme les journées de travail en Chine (9h-21h, six jours sur sept) Ils se sont mis tous ensemble avec des semaines à 69 heures pour reconstruire un pays.”

 

Le Miracle du fleuve Han

 

En Asie, cette remontada économique est connue comme « le Miracle du fleuve Han« , du nom du fleuve long de 514 km qui traverse la capitale Séoul. En effet, comment le pays a t-il pu en si peu de temps, redresser son économie alors que l’essentiel de son appareil productif avait été détruit par la Guerre de Corée (1950-1953) ?

 

 

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Photo à la Une : © Presse

Victor Gosselin
Victor Gosselin
Victor Gosselin est journaliste spécialisé luxe, RH, tech, retail et consultant éditorial. Diplômé de l’EIML Paris, il évolue depuis 9 ans dans le luxe. Féru de mode, d’Asie, d’histoire et de long format, cet ex-Welcome To The Jungle et Time To Disrupt aime analyser l’info sous l’angle sociologique et culturel.

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