La situation du cognac européen est sous les projecteurs alors que les tensions commerciales avec la Chine s’intensifient. La récente enquête antidumping ouverte par l’Empire du milieu sur le brandy importé de l’Union européenne suscite des inquiétudes quant aux répercussions sur le marché du cognac et les grandes entreprises du secteur.
Après les mesures de l’administration Trump en 2019, la Chine prend à son tour pour cible les alcools forts français, exacerbant les tensions commerciales entre l’Union européenne (UE) et la Chine. Le 5 janvier 2024, Pékin a annoncé l’ouverture d’une enquête antidumping sur le brandy importé de l’UE, principalement dirigée contre la France. Cette décision fait suite à une plainte déposée par l’Association des boissons alcoolisées de Chine au nom de l’industrie nationale du brandy.
L’enquête chinoise est une réponse directe à l’enquête antidumping lancée par la Commission européenne en décembre 2023 sur les importations de biodiesel en provenance de Chine. Ces litiges commerciaux s’inscrivent dans le cadre d’une série d’accusations mutuelles de concurrence déloyale et de protectionnisme entre les deux parties.
La Chine a importé pour 1,60 milliard de dollars de spiritueux à base de vin distillé pendant les onze premiers mois 2023, dont 99,8 % provenaient de France. Cette demande, en grande partie portée par le cognac, représente une part significative des exportations françaises, avec près de 50 millions de bouteilles vendues en 2022 en Asie de l’Est.
En effet, trois grandes entreprises se partagent le marché asiatique du cognac : Rémy Cointreau, Pernod Ricard et Hennessy, propriété du groupe LVMH. Pernod Ricard réalise notamment 10 % de son chiffre d’affaires en Chine, le cognac représentant plus de 50 % de ses ventes.
Répercussions économiques immédiates
À la suite de l’annonce de l’enquête chinoise, les cours boursiers des entreprises françaises de spiritueux ont connu des baisses significatives. Rémy Cointreau a enregistré une chute de 11 points, Pernod Ricard de 5 points et LVMH de 2 points. Le groupe italien Campari a lui aussi enregistré une baisse de 2 %. Le mois dernier, Campari a acquis la marque française de cognac Courvoisier dans le but d’étendre sa présence en Chine, où elle génère environ 9 % de ses revenus.
L’Association des producteurs de cognac en France a déclaré coopérer pleinement avec les autorités chinoises, tout en estimant que l’enquête est liée à un différend commercial plus large. « Nous sommes convaincus que nos produits et nos pratiques commerciales respectent pleinement les réglementations chinoises et internationales », a déclaré de son côté le Bureau National Interprofessionnel du Cognac (BNIC), qui représente les producteurs français.
Si la Chine venait à réduire drastiquement ses importations d’alcool fort, cela aurait un impact majeur sur la filière des spiritueux français, fortement dépendante des exportations. Les récents événements soulignent la fragilité de ce marché et la nécessité pour les acteurs européens de diversifier leurs partenariats commerciaux.
La Commission européenne a déclaré qu’elle évaluait la documentation qu’elle avait reçue et interviendrait dans le cadre de l’enquête, le cas échéant, en étroite coopération avec l’industrie européenne concernée.
Notons d’ailleurs que les Vins et Spiritueux ne connaissent pas leur meilleur jour en Asie. En effet, en avril dernier, Pernod Ricard a eu affaire avec la justice indienne. Le groupe s’est fait poursuivre pour avoir violé la politique en matière d’alcool de la capitale indienne New Delhi et a connu des pertes financières considérables. Plus récemment, le leader mondial des vins et des spiritueux premium a fait l’objet d’une enquête sur une présumée collusion avec les détaillants du Sud de l’Inde.
Guerre de protectionnisme
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Photo à la Une : © Hennessy